Ce soir dès 00h00 (Date et Horaire Métropole, ndlr), France 3 et les plateformes numériques de France Télévisions dévoileront un documentaire inédit consacré à Loïc Léry, l’auteur du polar Le gang des Antillais. Réalisé par Sonia Medina et Stéphane Krausz, ce film dresse un portrait sans filtre d’un homme au parcours hors du commun, marqué par la violence, la révolte et, surtout, la renaissance par les mots.
D’un destin brisé à une plume libérée
Né en Martinique, troisième d’une fratrie de sept enfants, Loïc Léry grandit dans un foyer modeste : un père marin pêcheur et une mère agent hospitalier. Comme de nombreux jeunes ultramarins dans les années 1970, il est envoyé à Paris par le Bumidom (Bureau pour le développement des migrations dans les départements d’Outre-mer), programme censé offrir de meilleures perspectives aux « Domiens ». À seulement 13 ans, il découvre la métropole et fait rapidement face au racisme et à l’exclusion sociale. Deux ans plus tard, il quitte l’école et enchaîne les petits boulots – balayeur, coursier, vendeur, agent hospitalier – avant de fonder une famille.
Mais la précarité et le sentiment d’injustice mènent l’adolescent révolté vers un autre destin. À la fin des années 1970, il rejoint le gang des Antillais, un groupe de braqueurs qui s’en prend aux bureaux de poste de la région parisienne. Surnommé « le Colibri », il est arrêté le 12 octobre 1979 et incarcéré à Fleury-Mérogis.
La prison comme école de rédemption
Placée en isolement après une rixe, sa détention devient paradoxalement un tournant salvateur. Loïc Léry découvre alors la pensée d’Angela Davis, de Frantz Fanon, de Cheikh Anta Diop et d’Aimé Césaire. Ses lectures attirent l’attention du directeur de la prison, qui fait appel à Patrick Chamoiseau, alors éducateur social. Ce dernier, futur lauréat du Prix Goncourt 1992 pour Texaco, décèle chez le jeune détenu un talent brut et l’encourage à écrire : « Fais de la plume ton arme. »
Dans sa cellule, Léry se met à écrire sans relâche. En décembre 1984, il achève le manuscrit de Le gang des Antillais, un roman inspiré de sa propre histoire. Après son transfert à la prison de Poissy, puis à Fort-de-France, il retrouve sa terre natale, où son livre connaît un succès d’estime.
De la littérature au cinéma
Revenu à la vie civile, Léry reprend la mer, puis retrouve le milieu hospitalier, suivant ainsi les traces de ses parents. En 2016, son œuvre renaît à travers le film Le gang des Antillais, adapté au cinéma par Jean-Claude Barny. Cette adaptation, à la fois sociale et intime, résonne comme un écho générationnel entre deux destins caribéens marqués par la migration, la lutte et la mémoire.
Un homme apaisé, un écrivain debout
Aujourd’hui âgé de 64 ans, Loïc Léry partage son temps entre son travail à l’hôpital de Fort-de-France et l’écriture de romans policiers. Quarante ans après sa chute, il se définit avant tout comme un homme libre, habité par la volonté de transmettre et de témoigner.
À travers ce documentaire, les réalisateurs Sonia Medina et Stéphane Krausz signent le portrait d’un homme debout, symbole d’une génération marquée par l’exil et la rédemption. Du flingue au stylo, le parcours de Loïc Léry rappelle que certaines cicatrices deviennent, avec le temps, des pages de littérature.














