Chaque 20 décembre, La Réunion s’embrase de chants, de danses et de mémoire. La Fèt Kaf – fête de la liberté – célèbre l’abolition de l’esclavage, et avec elle, l’art musical le plus emblématique de l’île : le maloya.
Longtemps interdit, puis réhabilité grâce à des figures militantes comme Danyèl Waro ou Granmoun Lélé, ce chant né dans les plantations sucrières est aujourd’hui reconnu patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Mais plus qu’un héritage, il est devenu une source de création contemporaine et un miroir des mutations sociales.
Le documentaire « Flanbo Maloya », disponible sur La1ere.fr et france.tv, propose un voyage musical inédit à travers les regards et les sons de quatre artistes et groupes réunionnais : Saodaj’, Labelle, Kaloune et Maya Kamaty.
Le maloya, d’une musique interdite à un symbole universel
Né du métissage culturel entre Madagascar et l’Afrique de l’Est, le maloya fut d’abord une musique rituelle dédiée aux ancêtres. Devenu par la suite chant de plainte et de résistance des esclaves, il a été frappé d’interdiction par les autorités coloniales et françaises jusqu’à la fin des années 1970.
Aujourd’hui, ses rythmes portés par le kayamb, le roulèr ou le pikèr vibrent dans les rues, les salles de concert et les festivals internationaux. Et si son essence reste la même – une parole chantée qui dialogue avec la mémoire –, ses formes ont évolué : il se marie au reggae, au jazz, au slam et même à l’électro, reflétant l’énergie et la créativité de la jeunesse réunionnaise.
Une nouvelle génération aux racines plurielles
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Saodaj’
Le groupe insuffle au maloya une énergie poétique et moderne. En fusionnant instruments traditionnels et sonorités actuelles, il fait de chaque morceau une passerelle entre la mémoire des ancêtres et les combats du présent.
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Labelle
Compositeur visionnaire, Labelle explore un univers électronique métissé, qu’il appelle « maloya électronique ». Ses créations tissent un pont entre la transe ancestrale et les musiques électroniques contemporaines, affirmant La Réunion comme un laboratoire musical planétaire.
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Kaloune
Artiste engagée, Kaloune mêle maloya et slam. Sa voix porte les revendications féminines, sociales et écologiques, tout en renouant avec les traditions orales et spirituelles de l’île. Son art incarne une Réunion en pleine mutation, entre mémoire et luttes contemporaines.
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Maya Kamaty
Fille de Gilbert Pounia (leader du groupe Ziskakan), Maya Kamaty trace son propre chemin. Sa musique, entre maloya, pop et folk, séduit par sa douceur et son ouverture au monde. Elle illustre une identité réunionnaise en mouvement, ouverte aux influences tout en restant fidèle à ses racines.
Flanbo Maloya : un documentaire comme une traversée
Réalisé par Thomas Marie et Benoît Pergent, ce film de 52 minutes n’est pas seulement une immersion musicale : il raconte l’histoire d’un peuple qui transforme son passé en force créatrice. Entre archives, performances et témoignages d’artistes, le documentaire dessine une cartographie sensible de l’île, de ses mémoires douloureuses à ses espoirs futurs.
Entre tradition et modernité, une flamme toujours vive
Avec près de 300 groupes actifs, le maloya continue de résonner comme un souffle identitaire et universel. Sa capacité à se réinventer, à se métisser et à dialoguer avec d’autres cultures en fait un art vivant, à la fois ancré dans le passé et tourné vers l’avenir.
« Flanbo Maloya » illustre cette vitalité : la force d’une musique née de l’oppression, devenue hymne à la liberté et à la diversité. Une invitation à écouter, danser et comprendre La Réunion autrement, par le prisme de ses voix et de ses tambours.














